Le modèle de la cheminée n° 19 apparaît dans le catalogue des Fonderies et manufactures Godin-Lemaire publié en 1863. La note introductive de l’album souligne l’élégance de ces « meubles de chauffage » d’une « exécution artistique des plus riches ». La volonté de conférer à des appareils utilitaires une valeur décorative caractérise la production industrielle de Godin. Cuisinières et appareils de chauffage prennent l’apparence de meubles qui participent à la décoration des intérieurs. La finesse des ornements qu’on peut observer sur les anciens appareils, créés du vivant de Godin, témoigne de la qualité des fontes utilisées et du savoir-faire des fondeurs des ateliers de moulage.

La cheminée n° 19 se distingue par sa richesse ornementale composée de motifs floraux, végétaux et de rinceaux qui se déploient sur toute la surface de l’objet. À partir de 1867, les catalogues de la manufacture du Familistère répartissent les appareils par séries. Le modèle n° 19 est classé dans la troisième série consacrée aux « cheminées simples » qui rassemble les plus anciens modèles de cheminées à feu ouvert commercialisés à « un prix modique, dans lesquelles sont réunis les moyens d’un chauffage économique et salubre ». La stratégie commerciale adoptée par Godin allie l’exigence de la qualité à la volonté de proposer des marchandises accessibles à toutes les bourses. Les acheteurs peu fortunés peuvent se procurer des appareils efficaces et à bas coût mais qui sont aussi des meubles décoratifs. La cheminée n° 19 entre dans cette catégorie.

Ce modèle est commercialisé à partir de 1863 jusqu’en 1914. Toutefois, l’inscription « Godin-Lemaire / Guise Aisne » permet de situer sa période de fabrication entre 1863 et 1880. Marié sous le régime de la communauté de biens, Godin utilise dans un premier temps la raison sociale « Godin-Lemaire », du nom de sa première épouse, copropriétaire des fonderies d’Esquéhéries, puis de Guise (1846) et de Laeken (1858). La liquidation de la communauté de biens prononcée en mars 1877, Godin est libre de fonder en 1880 l’Association coopérative du capital et du travail et de changer la raison sociale de la manufacture qui devient « Société du Familistère Godin & C^ie ».

Bibliographie :
Dos Santos (Jessica), L’Utopie en héritage. La Société du Familistère de Guise, de la mort de Jean-Baptiste André Godin à la dissolution de l’Association (1888-1968), Lille, Thèse de doctorat, Université Charles de Gaulle – Lille III, 2012, 827 p.
Album des Fonderies et manufactures Godin-Lemaire, 1863, pl. XXXVI.