Au cours de l’été 1866, l’architecte anglais Henry Roberts, autorité en matière de logement populaire, visite le Familistère de Guise. Il juge que les installations sanitaires y « sont d’une facture exceptionnellement bonne pour le continent ». Le compliment mérite d’être relevé, car les Anglais sont alors les champions européens de la plomberie sanitaire. Il est possible que Jean-Baptiste André Godin ait tiré profit de sa visite à l’Exposition universelle de Londres en 1862, où des toilettes perfectionnées étaient exposées et mise à la disposition du public.

Le Palais social est édifié à partir de 1859 et, aussitôt, les Fonderies et manufactures Godin-Lemaire contribuent à son équipement. On retrouve dans le catalogue de la manufacture les modèles de certains appareils, meubles ou articles de bâtiment, qui ont été mis au point pour satisfaire les besoins de la population du Familistère. Ainsi, l’album de 1867 présente les premiers « appareils inodores » en fonte de fer, vraisemblablement fabriqués à l’origine pour les bâtiments d’habitation du Familistère. La fabrication de ces appareils sanitaires est développée par la Société du Familistère au cours du XIX^e siècle.

Le rare appareil sanitaire conservé au Familistère de Guise provient du village de Lesquielles-Saint-Germain, proche de Guise. Il s’agit d’un « appareil inodore à socle orné avec mouvement à levier », dont le modèle est créé par la Société du Familistère en 1914 (n^os 115, 117, 118 ou 120) ou en 1925 (n° 113 ou n° 116). Le levier, actionné par le bouton du dessus, abaisse le clapet obturant la descente du conduit de la cuvette et, simultanément, ouvre le robinet d’eau jaillissant dans la cuvette. L’album général de 1914 indique : « Sauf avis contraire, ces appareils sont livrés en fonte ordinaire vernie noire avec cuvette ronde demi-porcelaine et simple siège abattant en hêtre verni façon acajou. Sur demande, ils peuvent être fournis : 1° avec cuvette ronde en porcelaine ; 2° avec cuvette ovale à bec en porcelaine ou demi-porcelaine ; 3° avec socle en fonte peinte, bronzée ou émaillée de toute couleur ; 4° avec siège abattant à couvercle en hêtre verni façon acajou ». L’exemplaire du Familistère présente une partie des options proposées par le catalogue : la cuvette en porcelaine est ovale et le socle est en fonte peinte.

Bibliographie :
Roberts (Henry), « Notes on the Familistère, or Workmen’s Home, at Guise », Labourer’s Friend Magazine, 18 août 1866.
Album général de janvier 1914 de la Société du Familistère de Guise Colin & C^ie, Saint-Étienne, Imprimerie Bruyère, 1914, p. 382.
Album de reconstitution n° 5 de la Société du Familistère de Guise Colin & C^ie. Mai 1925, 1925, p. 175.