L’assemblée générale ordinaire des travailleurs associés de l’Association coopérative du capital et du travail, fondée en 1880 par Godin, a lieu chaque année au mois d’octobre dans le théâtre du Familistère. L’assemblée débute avec le rapport de l’administrateur-gérant sur la situation morale, industrielle et financière de la Société du Familistère, soumis à l’approbation des associés.

Derrière la table installée en avant de la scène du théâtre, a pris place le conseil de gérance de l’Association. L’administrateur-gérant, Louis-Victor Colin, élu en septembre 1897 en remplacement de son beau-père François Dequenne, semble lire son rapport annuel. À sa droite sont assis Marie Moret veuve Godin, qui siège en tant que membre honoraire du conseil nommée par le fondateur, et Antoine Piponnier, le doyen du conseil. Un peu plus loin, se sont assis Jules Alizard et Aimé Quent, conseillers chevronnés. Sur la table devant Louis-Victor Colin est posée une urne, utilisée pour l’élection à bulletin secret des conseillers de gérance non membres de droit, et des conseillers de surveillance, dont le mandat a une durée d’un an.

Les associés composant l’assemblée sont assis sur des bancs en bois, qui équipaient la salle avant 1918. Le lustre à gaz, visible sur la gauche, autorisaient les réunions et les spectacles nocturnes, mais la salle bénéficiait aussi, comme on peut le voir sur la photographie, d’un éclairage zénithal naturel.

La photographie est reproduite dans la brochure Le Familistère illustré... et ainsi commentée : « La vue 44 prise le 2 octobre 1898 nous introduit au théâtre, au moment où l'assemblée générale des associés tient sa séance annuelle. Nous y voyons l'administrateur-gérant lisant son rapport, entouré des membres du conseil de gérance. Si l'objectif photographique l'eût permis, notre gravure représenterait, outre la partie masculine de l'auditoire, les dames salariées par l'Association et admises à la qualité d'associées au même titre que les hommes. » (p. 58) En bas, sur la gauche de la photographie, apparaît Émilie Dallet-Moret, sœur de Marie Moret et co-auteure de la brochure. Une autre photographie (inv. n° 1976-1-351) montre justement la partie féminine de l'assistance.

Grâce à l'étude de la correspondance de Marie Moret entamée en 2021 au sein du projet FamiliLettres, cette photographie est désormais attribuée à Marie-Jeanne Dallet (1872-1941), nièce de Marie Moret, qui pratique la photographie en amatrice dès 1897. Ces vues du Familistère, qualifiées par Marie Moret d' « intéressantes et instructives », ont servi à la réalisation de diapositives pour conférences avec projection, données entre autres par Auguste Fabre. Une partie de ces vues, dont celle-ci, a également servi d'illustrations pour la brochure Le Familistère illustré… parue à l'été 1900 et co-écrite par Auguste Fabre, Jules Jean Prudhommeaux, Émilie et Marie-Jeanne Dallet.

Sources et bibliographie :
Guise, archives du Familistère de Guise : catalogue manuscrit du musée de la Société du Familistère de Guise, sans date, fol. 130, n° 4450 ; correspondance de Marie Moret (inv. n° 1999-9-51 à 60 et 2005-0-122 à 129).
Le Devoir, t. XXII, 1898, p. 648 et suivantes.
[Dallet (Émilie), Dallet (Marie-Jeanne), Fabre (Auguste), Prudhommeaux (Jules)], Le Familistère illustré. Résultat de vingt ans d’association. 1880-1900, Paris, Guillaumin & C^ie, [1900], p. 58.