Madame Roger prépare le matelas d’un berceau de la nourricerie du Familistère.

Madame Roger prépare le matelas d’un berceau de la nourricerie du Familistère. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

La crèche du Familistère est située au nord du pavillon central du Palais social

La crèche du Familistère au nord du pavillon central du Palais social. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

Des enfants posent sur l'herbe, devant la crèche du Familistère.

Enfants devant la crèche du Familistère. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

Deux nourrices veillent dans la nourricerie du Familistère

La nourricerie du Familistère. Photographie De Jongh Frères, 1899. Collection Familistère de Guise.

Des nourrissons prennent l'air devant la porte ouverte de la nourricerie.

Nourrissons et nourrices dans la crèche du Familistère. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

Les enfants de la nourricerie du Familistère apprennent à marcher sur un promeno

Le promenoir de la nourricerie du Familistère. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

Des enfants jouent au sol dans le pouponnat du Familistère.

Jeux éducatifs dans le pouponnat du Familistère. Photographie Marie-Jeanne Dallet-Prudhommeaux, vers 1897. Collection Familistère de Guise.

Nourricerie et pouponnat

Le petit édifice construit en 1866 à l’arrière du Palais social est l’un des bâtiments les plus originaux du Familistère. Il est consacré aux soins et à l’éducation de la petite enfance. Godin refuse de l’appeler crèche ou asile. « Le berceau de l’enfant ne portera donc pas le nom de l’auge où mangent les animaux ; le lieu où il va régler ses premiers ébats et préparer son aptitude à l’étude, ne dira pas qu’il est l’enfant d’un vagabond. », explique Alexandre Oyon en 1865.

L’enfance nouvelle

La nomenclature familistérienne de la petite enfance est un hommage à Charles Fourier, dont Godin admire sans réserve la conception de l’éducation harmonienne. Fourier distingue les nourrissons (de 0 à 1 an), les poupons (de 1 à 2 ans), les lutins (de 2 à 3 ans), les bambins (de 3 à 4 ans et demi), les chérubins (de 4 à 6 ans et demi). Godin adapte cette échelle des âges à l’organisation de l’instruction publique de son temps : la nourricerie correspond à la crèche (de 0 à 2 ans), le pouponnat et le bambinat à l’asile ou école maternelle (de 2 à 6 ans).

Il choisit d’associer les nourrissons et les poupons afin d’introduire une émulation dans l’éducation des plus petits et de façon à ce que le passage d’une classe d’âge à l’autre s’effectue en fonction des progrès de chaque enfant. Godin écrit ainsi en 1871 dans Solutions sociales : « l’enfant reste à la nourricerie jusqu’à l’âge où, devenu propre et bon marcheur, il demande lui-même, et avec instance, à aller au Pouponnat prendre part aux exercices des poupons, ou petits bambins ; cela a lieu ordinairement vers l’âge de 26 à 28 mois. »

Premier essai

La première tentative d’organisation des services de la petite enfance du Familistère a lieu en 1861-1862 dans des appartements de l’aile gauche du palais. L’essai prend fin parce que les familles sont réticentes à confier leurs enfants à la crèche et que les installations et la qualité du personnel sont jugées insuffisantes. Godin mûrit son projet et c’est au cours de l’année 1865 qu’il décide d’élever un bâtiment spécial consacré aux soins et à l’éducation des plus jeunes enfants, directement relié au palais. Pour mettre au point cet équipement qu’il veut exemplaire, il s’inspire des travaux d’un spécialiste de la question, le fouriériste Jules Delbruck, auteur en 1846 de la Visite à la crèche-modèle : et rapport général adressé à M. Marbeau sur les crèches de Paris.

La crèche modèle

Le remarquable édifice abritant la nourricerie et le pouponnat est achevé en août 1866. Le bâtiment est implanté sur les pelouses au nord du pavillon central ; son rez-de-chaussée est surélevé de près de deux mètres au-dessus du sol inondable. La crèche se trouve ainsi de plain-pied avec la cour du pavillon central et communique avec elle par une passerelle couverte. La construction est entourée sur trois côtés d’une galerie en partie abritée sur laquelle les enfants peuvent jouer et prendre l’air. À l’arrière, un terre-plein donne accès aux pelouses. Les dispositions intérieures, le mobilier et les accessoires sont soigneusement conçus.

La nourricerie du Familistère est ouverte jour et nuit aux habitants du palais. Les nourrissons peuvent y passer la nuit. Elle a une capacité de 50 berceaux. En 1882, la crèche accueille 40 nourrissons et 56 poupons des deux sexes. La liste des exercices proposés aux poupons est étendue : exercices de gymnastique en chantant ; récits par les maîtresses d’histoires morales et instructives ; exhibition d’images explicatives ; chant de l’alphabet en désignant chaque lettre; chant des chiffres de 1 à 100, comptés sur le boulier, etc.

Le berceau absorbant

La méthode expérimentale de Godin trouve une grande diversité d’application au Palais social. À partir de l’exemple des premières crèches parisiennes, Godin définit un modèle de berceau-hamac non berçant, portatif, à structure métallique reposant sur deux pieds en fonte de fer. Pour équiper le berceau de la crèche du Familistère, il s’inspire du matelas décrit par le fouriériste Auguste Savardan, une litière de son.

Godin publie le résultat de ses recherches dans l’Annuaire de l’association en 1867 : « Le coucher de l’enfant est toujours sec et sans odeur, il a fallu bien des tâtonnements pour en arriver là. d’abord on s’est servi de toiles en caoutchouc avec tubes en cuivre, passant à travers le matelas et conduisant l’urine dans un vase ; mais cette toile, qui coûtait cher, se perçait vite près du tube et l’humidité envahissait le matelas. Des feutres absorbants, des couches en laine, etc., n’aboutirent pas à un meilleur résultat. Ensuite on coucha les enfants dans le son, mais le lever du matin était par trop laborieux, il fallait un lavage général pour enlever le son séché et collé sur le corps : ce qui était praticable dans une famille où la mère se consacre au soin d’un seul enfant n’était plus possible pour 30 enfants à lever presque tous à la fois. Enfin, on s’est avisé de lacer une toile en fort coutil sur une tringle ovale, ce qui compose le corps d’un berceau très gracieux ; dans le fond de cette toile on verse 30 à 40 litres de gros son, qui, recouvert d’un petit drap, compose le matelas ; l’oreiller peut également être bourré de son. »

En 1880, le modèle de la structure du berceau de la nourricerie du Palais social est mis au catalogue des productions des Fonderies et manufactures de la société du Familistère Godin & Cie.

Très endommagée pendant la Grande Guerre, la nourricerie-pouponnat du Familistère n’est pas reconstruite après 1918. Son implantation est évoquée sur la pelouse au nord du pavillon central.

 

Voir aussi sur le site :
Le Familistère par l'image : La crèche du Familistère
Le Familistère par l'image : Une crèche modèle

Pour aller plus loin :
L’album du Familistère, Guise, Les Éditions du Familistère, 2017, p. 312-321.
Jean-Baptiste André Godin, Solutions sociales, Guise, Les Éditions du Familistère, 2010 (réédition de l’ouvrage paru en 1871), p. 514-525.

Notice créée le 02/11/2017. Dernière modification le 26/08/2022.