3 avril 2018
Le chapeau du couvreur
Une jolie découverte a été faite au début du chantier de restauration de l’aile gauche du Familistère : le chapeau qu’un couvreur avait oublié sur la toiture en 1923, à l’époque de la construction de l’édifice.
Restaurer c’est, toujours, faire histoire
Le chantier de restauration de l’aile gauche du Familistère a commencé au mois de février 2018 par la découverture des toitures : dépose des tuiles anciennes et des ouvrages de zinc sur les chéneaux, les faîtages, les œil-de-bœuf et les lucarnes. C’est en déshabillant une lucarne, en mettant à nu le bâti en bois qui supporte la forme en zinc, que les compagnons de l’entreprise Gourdon, chargée des travaux de couverture sur le chantier, ont fait la découverte. Un chapeau en feutre beige, à bord étroit, orné d’une fine cordelette faisant office de galon, se trouvait dans le vide du fronton du bâti de la lucarne. Le couvre-chef, usé et cabossé, était enfermé là, derrière l’enveloppe de zinc, depuis la reconstruction de l’édifice en 1922-1924.
La scène a peut-être été photographiée
Par chance, une photographie prise en novembre 1923 permet de se représenter la scène de la disparition du chapeau. C’est le début des travaux de couverture de l’aile gauche. Sur la charpente métallique de l’aile située du côté de la place, s’affaire une équipe de 7 à 8 couvreurs. Plusieurs sont occupés à poser des tuiles sur la partie supérieure de la charpente. Au niveau inférieur, contre le brisis, les formes en zinc des lucarnes sont prêtes à être installées sur les bâtis en bois déjà en place. La première, sur la gauche, a déjà été posée. Bientôt, peut-être à l’occasion d’une pause, l’un des couvreurs déposera son chapeau dans le creux du fronton cintré de la structure en bois de l’une des lucarnes. Avant qu’il se souvienne de l’endroit où il l'a placé, les ouvriers auront installé la forme de zinc sur le bâti de la lucarne, emprisonnant ainsi le chapeau pour 94 ans et quelques mois.
Le vieux couvre-chef nous fait-il signe ?
Mais on peut aussi se demander si le dépôt n’a pas été volontaire de la part du couvreur. Les compagnons des métiers du bâtiment ont pour tradition de signer diversement leurs ouvrages. Ils peuvent inscrire une marque, un nom ou une date, ou encore cacher dans une partie inaccessible de l’édifice un trophée, plus ou moins « parlant », qui témoigne de leur présence sur le chantier. « Voilà un galurin bien fatigué », se dit le couvreur. « On pourrait en faire l’offrande à nos successeurs », lance-t-il de bonne humeur à ses camarades des hauteurs, alors que les zingueurs achèvent la lucarne. Son rire s’adresse aux compagnons de la restauration de l’édifice en 2018.
Voir aussi sur le site :
Le Familistère par l’image : La reconstruction de l’aile gauche du Palais social