14 octobre 2019
2019-2020 Le chantier de restauration des collections du Familistère
En juin 2019 a démarré le chantier de restauration de plus d’une vingtaine d’objets des collections du Familistère. Il s’agit d’un ensemble de cuisinières, d’appareils de chauffage, d’articles de quincaillerie et d’enseignes publicitaires qui est confié à l’expertise et au savoir-faire de Clara Huynh, Anaïs Braja et Juliette Zelinsky, restauratrices du patrimoine spécialisées dans les arts du feu. Wenceslas Gasse, socleur, intervient sur la phase de sécurisation des œuvres. À l’issue de l’opération, prévue en 2020, ces pièces conservées dans les réserves, prendront place dans les salles d’exposition permanente du pavillon central.
Des œuvres inédites
La politique d’acquisition menée par le musée a permis de constituer un corpus de référence de la production industrielle des usines Godin, de 1840 aux années 1960. L’enrichissement des collections constitue une des missions principales du Familistère qui procède à des acquisitions onéreuses et gracieuses. La générosité de nombreux donateurs, en particulier de M. Patrick Nicolas, a permis la diversification et l’accroissement des collections. Vingt-cinq objets récemment acquis par le musée ont été choisis pour intégrer le parcours de l’exposition permanente du pavillon central. Le public pourra y découvrir le torréfacteur à café, cacao et chicorée n° 2, fabriqué du vivant de Godin, l’un des premiers modèles de radiateur à gaz créé par la Société du Familistère au début du XXe siècle, une enseigne publicitaire de trois mètres de largeur ou la cheminée « Osaka » à motifs géométriques de Deville & Cie, un appareil peu courant puisque fabriqué uniquement sur commande spéciale. Cette opération permettra de renouveler en partie les œuvres actuellement présentées dans le parcours permanent.
Restaurer le patrimoine
L’état actuel des œuvres, qui ont souffert de leur utilisation puis de leur abandon, ne permet pas de les exposer. L’ensemble des objets présente des altérations d’ordre mécanique et physico-chimique. L’objectif des interventions de restauration ne consiste pas à retrouver l’éclat du neuf mais à stabiliser les œuvres pour assurer leur conservation et restituer leur lisibilité en vue de leur présentation aux publics. Les opérations de restauration portent sur le nettoyage des surfaces intérieures et extérieures, le retrait ou l’allègement des produits de corrosion qui menacent directement la matière de l’œuvre, l’application d’une couche de protection, la consolidation des fragilités de surface (déplacages, écaillages, soulèvements, lacunes de l’émail et du revêtement métallique). Concernant les objets dont les lacunes ont un impact visuel fort, principalement lorsqu’elles sont localisées sur le devant, les restauratrices procèdent à la pause d’un comblement et à une mise en teinte de celui-ci. Cette intervention vise à restituer la continuité optique du décor émaillé ou du nickelage/chromage. Les œuvres présentant des altérations structurelles telles que des cassures évolutives ou des éléments désolidarisés sont renforcées et refixées.
Les actions de conservation-restauration sur les biens constitutifs des collections publiques des musées de France s’effectuent dans un cadre déontologique fixé par plusieurs codes nationaux et internationaux. Les interventions sont respectueuses de l’intégrité de l’objet, des matériaux d’origine et des traces matérielles de son histoire. Les produits et matériaux utilisés doivent se conformer à des critères de stabilité, de compatibilité, de réversibilité et de lisibilité. Chaque étape du travail de restauration est soigneusement documentée, photographiée et notifiée dans un rapport remis au musée.
Sécuriser pour mieux conserver
Présenter des œuvres originales aux publics peut parfois être source de dégradation pour le patrimoine. Dans le cas du Familistère, les appareils de chauffage et de cuisson sont exposés hors vitrines afin de créer une proximité avec les œuvres. Le caractère familier de ces objets, fabriqués initialement pour un usage domestique, attise la curiosité des visiteurs et visiteuses dont certain·e·s sont enclin·e·s à les toucher et à les manipuler. Les parties mobiles des appareils, déjà fragilisées par une longue période d’usage, sont particulièrement sollicitées : ouverture/fermeture des portes de four, du foyer, de l’étuve et des trappes de chargement. Ces manipulations causent diverses dégradations (rayures, démontage partiel/perte d’éléments, affaiblissement structurel, cassures, des départs de corrosion dus aux traces de doigts et à la transpiration des mains qui contiennent notamment du chlorure de sodium). La cuisinière n° 700 D est un exemple emblématique des altérations irréversibles causées par des manipulations peu précautionneuses. L’ouverture de la porte du four par une succession de visiteurs et visiteuses a provoqué la cassure complète de la charnière avec perte d’un fragment. Malgré une première restauration, de nouveau manipulée, la porte a été brisée une seconde fois.
Les musées de France ont pour mission de conserver des collections reconnues d'intérêt public. Afin de répondre à cet objectif et de garder une présentation de proximité avec les œuvres, le Familistère procède à la sécurisation directe des objets exposés. Un socleur, spécialisé dans le travail du métal, intervient spécifiquement sur cette partie, créant des dispositifs adaptés aux différents mécanismes de fermeture/ouverture des appareils. Les systèmes de blocage réalisés empêcheront l’ouverture et la fermeture répétée des ouvrants, peu compatible avec la conservation des œuvres. La mise en place d’une signalétique renouvelée dans les salles d’exposition permanente complètera la phase de sécurisation.
L’opération de restauration de vingt-cinq objets des collections du musée est conduite par le syndicat mixte du Familistère Godin avec le concours du Département de l’Aisne et de l’État (ministère de la Culture et de la Communication).